Perfecting Sound Forever : l’histoire de la musique enregistrée
par Greg Milner
Lorsque l’on appuie sur le bouton « play » de son lecteur de musique préféré, on ne s’arrête que très rarement pour s’émerveiller des avancées technologiques qui ont été nécessaires pour permettre la lecture d’un morceau de musique enregistré à un certain moment du passé, et répété à l’envi dans un salon, sur son téléphone, ou ailleurs, à tout moment du jour et de la nuit… Et pourtant la captation, le mixage, et le stockage du son reposent sur des briques technologiques plus que centenaires ! C’est l’histoire de ces techniques que Greg Milner se propose de couvrir dans son « Perfecting Sound Forever ».
Commençant au 19ème siècle avec les explorations de l’inventeur Thomas Edison et finissant avec les formats numériques du début du 20ème siècle, c’est une véritable épopée que l’on va vivre. Des premiers phonographes aux cassettes magnétiques, et à l’avènement du CD… L’histoire de la musique enregistrée ne manque pas de batailles de formats, de guerres commerciales, et de débats entre experts !
L’auteur dresse une véritable galerie de portraits, tous plus vifs les uns que les autres. On retrouve ainsi Stokowsky, ce chef d’orchestre, visible dans le Fantasia de Disney, qui a énormément expérimenté. Les pionniers de l’organisation de concerts « playback » sont là aussi. Ces derniers organisaient des concerts où les musiciens s’arrêtaient de jouer alors que la musique continuait, le tout devant des audiences émerveillées, pour prouver la qualité des enregistrements ! Ou encore les premiers « producteurs » musicaux, qui étaient en fait des ethno-musicologues qui écumaient les prisons du sud des Etats-Unis, pour enregistrer des chants d’esclaves afin de conserver ce qu’ils estimaient faire partie du patrimoine culturel du pays. Ces histoires, très humaines, ont été une réelle découverte pour moi.
Trop de technique tue la technique
Ces histoires laissent cependant place à des considérations beaucoup plus techniques dans la seconde moitié du livre. Milner raconte les inventions, leur diffusion dans le petit monde de la création musicale, et leur impact sur la musique de chaque époque. Trop technique à certains moments, on apprend tout de même beaucoup de choses sur le monde de l’enregistrement musical. L’enregistrement multi-piste, le mono vs. stereo, l’utilisation de Pro Tools… Le tout avec beaucoup d’illustrations, d’exemples de chansons spécifiques. Par exemple comment le multi-piste est utilisé pour les voix sur cette chanson de Les Paul et Mary Ford. Si on arrive à zapper certains passages peu engageants du bouquin, c’est tout de même très instructif.
Lors de la lecture, je me suis retrouvé à écouter beaucoup de musique, pour essayer d’identifier les concepts abordés dans le texte. Mais au final, il m’a souvent été difficile d’en comprendre les subtilités… Les débats autour du son restent en effet un domaine pour techniciens; ma compréhension reste minimale après cette lecture. Par exemple, j’ai encore parfois bien du mal à bien entendre la différence entre différents masters d’une même chanson.
Lecture peu agréable
Malheureusement, la lecture elle-même n’est pas forcément très agréable. D’abord parce que le sujet est technique, et qu’il est extrêmement difficile de partir sur des envolées lyriques dans cet espace. Mais aussi parce que Milner embrouille pas mal son lecteur avec de trop nombreux protagonistes. Quand John et Chris ont rencontré Ash, et qu’ils ont parlé du micro que Quentin a utilisé quand il a joué avec Josh… difficile de se rappeler qui est qui…
Autre point : le livre dans son ensemble est centré uniquement sur les USA. Seule une entreprise étrangère (et encore, on parle d’une australienne) est mentionnée sur quelques pages… Et trop peu d’artistes non-américains sont utilisés pour illustrer les propos. Dommage, cela limite vraiment la portée de l’histoire qui est racontée…
Au final, une lecture à recommander à des personnes ayant un réel intérêt pour la musique, et une certaine curiosité pour ses aspects techniques. Et qui n’ont pas forcément peur de ne pas suivre certains des concepts abordés si elles sont novices.