Le contraire de la solitude (The Opposite of Loneliness)
par Marina Keegan
Ce livre, qui contient une dizaine de nouvelles et une dizaine de courts essais, est la première publication réunissant des oeuvres écrites par la jeune américaine Marina Keegan. Ces textes ont tous été écrits avant qu’elle n’ait atteint son vingt-troisième anniversaire ! Ils seront aussi malheureusement les derniers qu’elle écrira. L’auteure a en effet perdu la vie dans un accident de la route quelques jours après la fin de ses études…
Cette catastrophe est importante à mentionner car, au-delà de l’aspect tragique qu’elle présente évidemment au niveau personnel, elle donne à regarder l’oeuvre de Marina Keegan à travers un prisme particulier. Forcément, à 22 ans, on a encore peu de vécu, et encore un style parfois naïf, presque « scolaire ». A cet égard, la prose de Keegan transpire la jeunesse et l’insouciance. Les sujets, notamment, sont tous assez banals : la vie quotidienne, un amour perdu, grandir… Keegan était un « diamant brut, » encore en quête de polissage.
Mais passé ce premier abord tristounet, Marina Keegan était profondément optimiste ! Elle avait des rêves, des projets, des histoires à raconter, et un monde à changer. Bercée aux codes des campus d’universités américaines, qu’elle décrit si bien dans ses nouvelles comme dans ses essais, elle avait cette foi infaillible en la capacité qu’elle et ses congénères avaient à bouger les lignes, à avoir un impact sur le monde qui les entoure. Et évidemment, le tragique pointe à nouveau le bout de son nez lorsque l’on lit ces mots issus du dernier texte qu’elle ait publié de son vivant, dans les colonnes du journal de l’université et s’adressant à ses camarades de promotion :
Nous devons nous rappeler que nous n’avons pas de limites ! Nous pouvons changer d’avis, nous pouvons recommencer autre chose. L’idée selon laquelle il est trop tard pour faire des choix importants est absurde. Nous finissons à peine nos études. Nous sommes si jeunes. Nous n’avons pas le droit d’abandonner cet état d’esprit où tout est encore possible : c’est la seule chose que nous ayons.
Traduit par mes soins – Marina Keegan, The Opposite of Loneliness
Ce mélange de naïveté et d’espoir est extrêmement touchant. Et m’a forcé à considérer chacun des textes du recueil comme un rappel de la naïveté que j’avais moi aussi au même âge. Avec beaucoup moins de talent littéraire, bien sûr… Keegan avait pour elle énormément de choses, et a semble-t-il toujours voulu croquer la vie à pleines dents. Les histoires personnelles qu’elle raconte dans ce recueil ainsi que la façon qu’elle a de jouer avec la mélancolie et la tristesse sont autant de rappels que la vie peut être courte, et qu’il ne faut jamais tomber dans la complaisance.
Et pour les anglophones qui souhaiteraient continuer à explorer le sujet, je recommande cette lecture rapide.