Island Dreams – Mapping an Obsession (Rêves d’îles – cartographie d’une obsession)
par Gavin Francis – site
Qu’est-ce qu’une île ? Géographiquement, c’est un bout de terre émergé se situant au milieu d’une étendue d’eau. Historiquement, ça peut être le lieu d’une bataille ou de signature d’un traité de paix. Mais Gavin Francis n’est venu nous faire un cours ni de géographie, ni d’histoire avec son « Island Dreams. » Si l’on devait classer ce livre, on aurait plutôt à choisir entre les catégories « livre de voyage », « littérature », et « philosophie. » Ou sans doute un mélange des trois…
Au fur et à mesure de ses pérégrinations d’île en île, Francis a observé des paysages dramatiques, fait des rencontres magiques, et dormi parmi une faune quasi-fantastique. Ayant une préférence pour les îles au climat froid (îles Féroé, îles Malouines, Ecosse…), il y cherche toute sa jeunesse durant… quelque chose ? Mais que cherche-t-il, en fait ?
Une île. Isola en italien. Isolement. La recherche de la paix intérieure, forcée par l’isolement, la retraite loin de la furie de la vie quotidienne en milieu urbain. La quête de sens de l’auteur l’entraîne vers des environnements toujours plus inhospitaliers et solitaires. Quête qu’il est d’ailleurs loin d’avoir menée à son terme. Entre isolement et connexion, entre rêve insulaire et communauté humaine, son cœur balance.
Et c’est cet écartèlement qui nous est conté dans Island Dreams. Né en Ecosse (tiens tiens, insulaire dès le départ), Gavin Francis devient médecin, mais il ne se destine jamais à un cabinet de médecine de ville. Il part immédiatement pour prendre un poste de médecin dans une station britannique en Antarctique. Il ira ensuite se balader dans les îles dès qu’il en aura l’occasion, les plus lointaines comme les plus proches. Et il nous emporte, rétrospectivement, dans sa valise.
Sur le fond comme sur la forme, ce bouquin est un trésor
Island Dreams adopte un format similaire à ce petit carnet que certains tiennent lorsqu’ils voyagent. Vous savez : ce journal pour consigner des impressions, fixer des lieux, garder trace des personnes rencontrées en chemin. Loin de respecter l’ordre chronologique de ses voyages pour autant, on papillonne entre différentes latitudes, différentes époques, et Gavin Francis nous fait part de ses réflexions et de ses états d’âme, à différents moments de sa vie.
J’ai énormément apprécié l’aspect presque méditatif de l’oeuvre. On peut presque s’arrêter toutes les deux pages pour réfléchir à ce que l’on vient de lire, ou tenter de relier le propos à des voyages que l’on a soi même effectués… Et le ton est très doux, très contemplatif. Peu d’affirmations à l’emporte pièce, surtout des observations, des suggestions. Une impression de sérénité m’a englobé pendant quasiment toute la lecture.
Au-delà des expériences personnelles de l’auteur, on trouve dans ce livre des citations pertinentes, ainsi que de très nombreuses cartes en couleur des îles dont il est question dans le texte. Les allusions aux grands voyageurs, fictifs ou réels, sont omniprésentes. On croise tantôt Melville, Robinson Crusoé, ou Thoreau. On se perd sur l’Utopie de Thomas Moore… La richesse des références littéraires sublime le texte. Vraiment un tour de force.
Enfin, l’aspect visuel du livre est au petits oignons ! L’objet lui même est extrêmement plaisant à toucher et regarder. Couverture en dur et reliure robuste, liserés en « or » sur la couverture, typographie aérée et agréable. Aucun détail n’est laissé au hasard. On tient dans ses mains un superbe livre. Je me suis même surpris deux ou trois fois à simplement tenir le bouquin en le regardant sous toutes les coutures pendant deux minutes, juste pour l’admirer. C’est rare.